3. Mettre en place une sécurité sociale professionnelle environnementale
Il est inacceptable que les travailleur·ses soient les premières victimes de la transition environnementale, à l’image de ce qui se passe dans le secteur de l’automobile. Pour mettre fin au chantage à l’emploi, il faut sécuriser l’emploi et les garanties individuelles et collectives des travailleur·ses en instaurant une sécurité sociale professionnelle, garantissant le maintien du contrat de travail et de leurs droits. Ceci leur permettrait de se former avec maintien de leur salaire pris en charge par un fond mutualisé pendant la transformation de leur entreprise et éviterait ainsi les licenciements. Cette proposition, portée de longue date par la CGT dans le cadre du nouveau statut du travail salarié, prend encore plus de sens au vu des transformations massives et rapides à apporter au tissu productif, tout en responsabilisant les donneur·ses d’ordre vis-à-vis de leurs sous-traitant·es.
Concrètement, pour amorcer la mise en place de la sécurité sociale professionnelle, il faudrait commencer par :
- limiter strictement la définition légale du licenciement économique aux difficultés économiques graves mettant en cause la survie de l’entreprise ;
- instaurer un droit de veto des CSE et assimilés sur les licenciements qui ne sont pas justifiés par des difficultés économiques graves et immédiates ;
- créer un droit effectif de contestation individuelle et collective de toute procédure de licenciement (qu’il soit individuel ou collectif) ; ce recours doit suspendre la procédure de licenciement ;
- sécuriser le contrat de travail : la règle de la disposition la plus favorable doit s’imposer, qu’elle soit celle du Code du travail, de la convention collective ou du contrat individuel de travail ;
- supprimer les barèmes prud’homaux, les accords de performance collective ou les ruptures conventionnelles qui offrent la possibilité aux employeurs de licencier sans motifs valables ;
- créer un fonds mutualisé pour les transitions environnementales et économiques au niveau de chaque branche professionnelle, financé par une contribution assise sur la masse salariale des ETI et grandes entreprises. Le maintien du contrat de travail serait obligatoire avec une obligation de reclassement au niveau des entreprises de la branche et du territoire et/ou l’accès à une formation qualifiante pendant au moins vingt-quatre mois. À l’issue de cette période, si la ou le salarié·e n’a pas retrouvé de poste, elle ou il basculerait à l’Unedic et bénéficierait de l’intégralité de ses droits à l’assurance chômage ;
- en complément, le contrat de sécurisation professionnelle devrait être renforcé et élargi pour allonger sa durée à vingt-quatre mois et le niveau d’indemnisation des bénéficiaires serait augmenté ;
- les fonds des dix-neuf comités stratégiques de filière devraient être mobilisés au service de cette sécurité sociale professionnelle. Les entreprises qui licencient ou ferment des capacités de production en France devraient être exclues du bénéfice des aides publiques. Par ailleurs une partie de ces fonds pourrait être réorientée pour financer la reconversion des travailleur·ses.
S’appuyer sur l’expérience du CTP :
Le contrat de transition professionnelle, expérimenté entre 2005 et 2011, fournit un excellent exemple de ce qu’il faudrait améliorer et généraliser. Ouvert aux entreprises de moins de mille travailleur·ses et aux entreprises qui engagent des procédures de licenciement pour motif économique sans condition d’effectif, le CTP permettait aux salarié·es d’être indemnisés à hauteur de 80 % du salaire brut, et donc de maintenir 92 % de leur salaire net pendant douze mois, avec un accompagnement renforcé et un accès à la formation accéléré. A l’issue du CSP, les personnes qui n’auront pas trouvé d’emploi basculent sur les indemnités chômage classiques. Il a ensuite été transformé en contrat de sécurisation professionnelle (CSP) toujours en vigueur aujourd’hui avec un niveau d’indemnisation malheureusement plus faible (75 % des allocations journalières de référence – AJR). Le dispositif a donné d’excellent résultats en termes de retour à l’emploi.